Ces derniers mois, j’ai beaucoup bougé en France, et en fin d’été, après être allée au Jardin du Chitelet, j’étais de passage en Suisse... J’en ai alors profité pour visiter les Conservatoire et Jardin Botaniques de Genève (CJB). Situé à côté du lac Léman, entre les sièges d’institutions internationales comme les Nations Unies ou l’Organisation Mondiale du Commerce... le jardin botanique ! Il rassemble environ 14 000 espèces et variétés, et fêtait cette année son bicentenaire, avec de nombreuses expositions et animations. C’est un jardin entièrement en agriculture biologique, respectant le cahier des charges « Bio Suisse ».
Les Conservatoire et Jardin botaniques de Genève sont aussi une institution scientifique, un lieu de recherche où viennent des scientifiques du monde entier. On y trouve un herbier parmi les plus riches, avec 6 millions d’échantillons... Ainsi qu’une bibliothèque riche et ouverte à tous, l’une des plus importantes au monde en matière en botanique (avec plus de 120 000 volumes !). C’est l’endroit parfait pour étudier la botanique et observer les plantes, qu’elles soient de climat tempéré ou tropical, sauvages ou horticoles, originaires de Suisse ou provenant de continents lointains.
Le parc et l'arboretum
Le Jardin botanique est composé d’un immense parc, avec de grandes et belles pelouses, qui donnent envie de s’installer pour faire la sieste, bouquiner, flâner... En dehors de ces larges espaces ouverts, il y a des zones plus ombragées où l’on trouve de superbes arbres, parfois assez âgés. Ainsi, en me promenant dans le parc, je découvre l'imposante silhouette d’un chêne tricentenaire... avant de tomber par hasard sur la floraison surprenante d’Acanthopanax wardii, un arbre de la famille du lierre. Plus loin, j’admire la silhouette graphique d’un Sophora japonica, que je trouve particulièrement élégante. Il y a aussi une allée de platanes âgés de 280 ans... Bref, les arbres du Jardin Botanique de Genève sont magnifiques !
La serre tempérée
La serre tempérée est une majestueuse serre en verre, aux formes arrondies. Elle est haute et peut ainsi accueillir dans sa partie centrale de très grands palmiers et arbres de climat tempéré. En y entrant, je passe devant une imposante fougère arborescente, Dicksonia antarctica. À ma droite, une partie regroupe des plantes d’Afrique, de Madagascar et des Canaries, avec de nombreuses plantes succulentes (des plantes charnues qui stockent l'eau dans leurs tissus pour résister à la sécheresse !) : Euphorbes, Alluaudia, Pachypodium... À gauche, une zone avec des plantes d’Amérique, essentiellement des cactus (des Coussins de belle-mère ou Echinocactus grusonii, des agaves, Parodia magnifica, Cleistocactus...). Puis j’arrive au fond de la serre, où la végétation se fait plus luxuriante, dans une zone qui rassemble des plantes originaires d'Australie, de Nouvelle-Zélande et de Tasmanie.
J’emprunte ensuite des escaliers qui me permettent de monter en haut de la serre pour arriver au niveau de la cime de ces plantes exotiques. D’ici, j’admire le feuillage des palmiers et les frondes des fougères arborescentes (Cyathea, Dicksonia antarctica...).
Le Jardin d'Hiver
C’est une grande serre avec une très belle architecture, datant de 1913. On y trouve des plantes tropicales fréquemment cultivées comme plantes d’intérieur, comme des bégonias, des Anthurium, ou le Spathiphyllum wallisii... Mais aussi des palmiers (Caryota mitis, Roystonea regia...), ainsi que de nombreuses plantes utilitaires : bananiers, caféiers, ananas, certaines donnant des arômes et épices bien connus : vanille, poivre, muscade, quatre-épices... Une table et des chaises invitent à s'installer pour profiter de ce décor luxuriant. J'aperçois au passage quelques papayes qui sont en train de murir.
La Serre tropicale
J’entre ensuite dans la serre tropicale. C'est une serre bien plus récente et moderne que les deux autres. On est tout de suite imprégné par cette atmosphère particulière, conjuguant une forte chaleur ambiante et un haut niveau d'humidité, ce qui donne la sensation un peu magique de se trouver dans une forêt tropicale. Au centre, un grand bassin, qui accueille le nénuphar géant originaire d'Amazonie (Victoria cruziana), avec tout autour une végétation luxuriante, composée de grandes fougères et de toutes sortes de plantes tropicales, souvent avec d’énormes feuillages. Il y a aussi de nombreuses plantes épiphytes (qui poussent sur les troncs d'autres plantes plutôt qu'au sol), des lianes, des orchidées, et un impressionnant mur végétal, d’où part une profusion de feuilles et de tiges entremêlées... Des arbres artificiels sont installés pour accueillir les plantes épiphytes, qui ont besoin d'un support sur lequel pousser. À ma droite s’ouvrent d’autres espaces avec des collections de plantes : la serre volcanique (inspiré du paysage des Canaries, avec des plantes succulentes de ces îles, mais aussi d’Afrique et d’Amérique...), la serre des broméliacées (rassemblant des plantes de la famille de l’Ananas), et celle des gesnériacées (la famille du Saintpaulia).
Dehors, juste devant la serre, mon regard est attiré par d’immenses fleurs d’un rouge velouté qui bougent avec le vent. Elles se détachent sur un superbe feuillage très découpé, vert tendre, presque jaune. Il s’agit d’Hibiscus coccineus, un hibiscus très original, qui provient des Etats-Unis, et qui pousse les pieds dans l’eau ! Je suis en admiration devant l’intensité de cette floraison et la légèreté du feuillage. Une plante vraiment magnifique !
À côté, une collection de plantes carnivores, où je peux admirer les pièges de Sarracenia flava.
Le mur fleuri
J’arrive devant un long mur sur lequel sont installées des plantes qui poussent en coussins. Elles forment des coussins denses et arrondis, qui viennent apporter du volume sur la paroi verticale, ce qui crée un effet surprenant ! J’y trouve la valériane rouge (Centranthus ruber), le thym à feuilles de sarriette (Thymus saturejoides), des aubriètes (Aubrieta gracilis), l'oeillet des Pyrénées (Dianthus pyrenaicus)... J’admire le feuillage blanc - argenté de Centaurea ragusina.
Ce mur contraste avec un autre mur végétal, plus frais, situé un peu plus loin. On y trouve des fougères, saxifrages, bergenias (Bergenia stracheyi), Tofieldia calyculata... Bien qu’il s’agisse de deux murs végétaux, l’effet visuel est totalement différent !
Les rocailles
Je découvre le jardin alpin, qui rassemble les plantes des montagnes du monde, exactement comme dans les jardins du Lautaret et du Chitelet. Les rocailles regroupent 2 800 espèces et variétés, et s'étendent sur un hectare. Elles sont composées de gros blocs de pierre sur lesquels sont installées les plantes alpines. Elles ont un côté très naturel, avec de nombreux recoins, passages, et sont disposées sur un paysage joliment vallonné... La présence de l’eau, sous forme de petits bassins ou de ruisseaux, rend cette partie du jardin encore plus agréable.
Je découvre des rocailles qui présentent la flore de Suisse : de grands massifs sont consacrés aux plantes des Alpes suisses, d'autres concernent la Steppe valaisienne et les plantes indigènes de la région genevoise... Il y a également un massif qui rassemble les plantes protégées en Suisse, dont certaines me sont familières : l'oeillet des Chartreux (Dianthus carthusianorum), la gentiane jaune (Gentiana lutea), la grande astrance (Astrantia major), la centaurée des montagnes (Centaurea montana)... Je découvre que l’Astrance est une plante protégée, en Suisse mais aussi dans quelques régions de France, bien qu’on la trouve facilement dans les jardins.
J’arrive en Asie, où sont rassemblées les plantes originaires du Japon, de Chine et de l’Himalaya. C’est un endroit agréable, avec un petit ruisseau qui passe, apportant de la fraicheur. Les feuillages sont magnifiques, entre le bambou sacré (Nandina domestica), les Érables (Acer)... ils sont accompagnés par l'élégante floraison des Anémones du Japon et les fruits globuleux d’un Cornus kousa. J’y découvre également les délicates fleurs bleues de Ceratostigma willmottianum, qui se détachent sur son feuillage nuancé de jaune - bronze.
L’Amérique est représentée, avec d’un côté les Andes, où je trouve par exemple des fuschias, et de l’autre, l’Amérique du Nord, avec des Asters (Aster novae-angliae), Echinacées (Echinacea pallida), ou Chrysogonum virginianum...
Je découvre les rocailles européennes où sont installées les plantes originaires du Jura, des Alpes, des Carpates et des Balkans... Dans le massif des Apennins et de la Sicile, je tombe sur les fleurs lumineuses du Crocus jaune d'automne (Sternbergia lutea), accompagnées par quelques cyclamens. Il y a également un massif Europe – Sibérie, où j'admire la floraison de Jurinea cyanoides.
Les collections
Au Jardin botanique de Genève, on trouve des collections qui regroupent un ensemble de plantes appartenant à un même genre botanique : je découvre ainsi de belles collections d’euphorbes, de saxifrages, de rhododendrons, d’hostas, d’eryngiums, de pivoines ou d’armoises... Cela permet de bien se rendre compte de la diversité qui existe au sein d’un même groupe de plantes. La collection de saxifrages m’impressionne : entre les petites rosettes de Saxifraga paniculata ou de Saxifraga rosacea et les grandes feuilles de Saxifraga pensylvanica, je constate qu'il existe des dizaines d'espèces avec des différences bien marquées.
Le Jardin des senteurs et du toucher
C’est un jardin des sens, spécialement conçu pour les aveugles et malvoyants. Je suis impressionnée : le pavage est travaillé pour prévenir à chaque fois que l’on arrive devant une étiquette, et l’étiquette en question est traduite en braille. Je trouve même un plan du jardin en relief, pour s’y retrouver juste avec le toucher ! Il y a des diffuseurs de senteurs, qui correspondent aux plantes présentées. Ce jardin rassemble 150 espèces, avec évidemment beaucoup de plantes aromatiques : lavande, thym serpolet, origan, romarin, hysope... Mais aussi la Glycine du Japon, la Corbeille d’argent (Lobularia maritima), des Lantanas, Tagetes tenuifolia, Platycodon, Echinacées, Santolines....
La roseraie historique
J’arrive dans la roseraie historique, qui présente des roses classées par époque (roses médiévales, roses du 19e siècle, roses modernes...) afin de retracer l'histoire de l'évolution des roses.
Au Jardin botanique de Genève, le temps semble s’arrêter, et l'on peut facilement y passer des heures ! Le parc est immense, rien que de le traverser — sans même s’arrêter — demande déjà du temps. On y trouve de superbes arbres, parfois très âgés. Les serres sont impressionnantes à la fois par leur architecture et les plantes qu’elles abritent. Le jardin alpin est magnifique, avec ses rocailles bien entretenues mais qui gardent un côté sauvage et spontané. Elles rappellent vraiment les milieux naturels, avec de gros blocs de pierre, un terrain vallonné, des ruisseaux et bassins. Un jardin si vaste, difficile à exposer dans un simple article – je me suis abstenue de parler du jardin ethnobotanique, du jardin japonais, de la collection de rhododendrons... Le Jardin Botanique de Genève regroupe comme mille jardins en un seul ! C’est un jardin vivant, et qui rayonne à l’international, avec des activités scientifiques, un herbier, une bibliothèque, une librairie, des expositions, des visites guidées... Les collections du Jardin botanique de Genève sont impressionnantes par leur richesse et leur diversité !
anne, le 8 Novembre 2017
merci pour ce beau reportage