Pour une fois, tout le monde est d'accord, le calendrier, les météorologistes et même les feuilles des arbres : l'automne est arrivé.
Depuis quelque temps beaucoup de vivaces et d'arbustes au jardin avaient donné le ton, laissant apparaître au milieu de verts estivaux quelques pigments bruns, rouges et or... L'automne est là, oui, quelque peu en avance, et le manque d'eau de cette année laisse penser que les arbres pourraient adopter rapidement leurs plus belles parures !
Mon jardin est un jardin d'automne. Souvent, les visiteurs que j'accueille sont surpris d'y trouver – et ce encore pour quasiment deux mois si le gel ne s'en mêle pas - autant de floraisons vives. Je me promène au jardin plongée dans les couleurs. Les dahlias bien sûr, qui rivalisent de nuances plus éclatantes les unes que les autres, mais aussi les asters familiers qui aiment donner le ton en septembre. Rose, rouge, pourpre, mauve, lilas, lavande, leur palette est elle aussi incroyable et indispensable, d'autant qu'ils attirent en général papillons et abeilles à la recherche de pollen pour constituer leurs réserves hivernales. Winter is coming...
À côté de ces deux classiques, rosiers, physostégies, héléniums, helianthus, rudbeckias, chrysanthèmes vivaces et échinacéas fleurissent – ou refleurissent – sans discontinuer, avec une générosité sans égale. Avec ses bordures qui chatoient mon jardin continue d'être un soleil.
Si certains jardiniers estiment qu'il est temps pour eux de rentrer au coin du feu et de se lover comme les chats dans des couvertures moelleuses, pour ma part l'automne est sans doute la saison que je préfère et où je passe le plus de temps dehors. À travailler bien sûr, car je redessine (du moins j'améliore) mes bordures par des plantations automnales, mais surtout à contempler la progressive transformation de la nature.
Les vertes collines boisées autour de mon village adoptent peu à peu des teintes de cuivre et de bronze. Le signal est donné.
En automne, la lumière est différente, elle est plus chaude, plus douce, même si les jours se font plus frais. Elle est aussi un cadeau que l'on savoure davantage alors que la nuit tombe plus vite. Avec cette lumière, les photos que l'on prend sont en général plus belles, les contrastes sont adoucis, les reflets sont multiples, et il me semble souvent que de la poudre d'or recouvre toutes fleurs du jardin, tandis celle d'argent se dépose sur les toiles d'araignées capturant rosées et premiers givres.
Et que dire des parfums de l'automne ? Pour ma part, j'ai toujours trouvé qu'ils étaient plus puissants en automne, plus concentrés. Le parfum sucré des dernières roses remontantes et des phlox, celui, divin, des glaïeuls d'Abyssinie, celui, particulier, des feuilles de dahlias froissées, ou simplement celui d'humus dans les taillis ou dans le compost bien mûr ; l'incroyable odeur de caramel du Cercidiphyllum qui embaume à une dizaine de mètres à la ronde ; celle des pommes achevant de rougir sur les arbres, celle, acide, des feuilles de saules qui jaunissent, et le parfum de toutes les vivaces séchées, qui continue de se répandre alors que leurs fleurs sont depuis longtemps mortes : fenouils, monardes, sauges...
Alors plutôt que de rester au coin du feu, je sors, et je vous invite à en faire de même.
Sortez dans votre jardin, évidemment, mais aussi dans les jardins des autres et dans les pépinières. Car c'est le moment idéal pour repérer tout ce qui pourra embellir et améliorer plus tard dans la saison ou l'année prochaine votre morceau d'Eden. Appareil photo et carnet de note à la main, allez à la rencontre de vos voisins et des producteurs du monde horticole, visitez les derniers jardins ouverts et promenez-vous dans les parcs publics.
Vous installerez vos dahlias en mai prochain mais c'est maintenant, dans les jardins et dans les pépinières encore plus que dans les catalogues, que vous pouvez aller repérer ceux dont les formes et les couleurs vous plaisent le mieux. Vous planterez tous vos arbres et arbustes en automne, à la Sainte Catherine, une fois qu'ils seront à bois nus tout comme le seront leurs racines, mais c'est maintenant que leurs feuillages commenceront à flamboyer et qu'il faut les repérer : sorbiers, liquidambars, cornouillers, chênes, érables, parrotias, cercis... De même pour les graminées qui seront idéalement repiquées au printemps, l'automne est le meilleur moment pour aller les voir in situ afin de pouvoir évaluer leur hauteur, leur développement, la manière dont elles dansent dans le vent, la couleur de leurs épis.
Rien ne saurait remplacer de telles visites.
Sortez en automne, pour préparer la fin de l'automne, pour préparer l'hiver, pour préparer le printemps.
Après, il sera temps de rentrer vous faire un thé brûlant, et, à l'aide de vos photos et de vos listes (toujours composées d'au moins cent noms de plantes dont vous n'envisagez plus de vous passer), de commencer à cocher dans les catalogues tout ce que vous commanderez.
Pour ma part, mon panier virtuel est déjà plein à craquer !
Claveau Mireille, le 14 Octobre 2017
J'adore comme vous, Sophie, le jardin en automne.
Votre texte m'a beaucoup plu !