Ça y est, enfin, nous y sommes : depuis le 1er janvier 2019, l'utilisation, mais aussi la détention de produits phytosanitaires (herbicides, pesticides et fongicides de synthèse) est désormais interdite pour les jardiniers amateurs. Cette grande avancée, nous la devons à la détermination de Joël Labbé, sénateur écologiste du Morbihan.
Merci Joël, on applaudit et les abeilles (entre autres) aussi !
Cette loi ayant été votée il y a quelques années déjà, il m'a semblé intéressant de faire un point.
1) La loi labbé, qu'est-ce que c'est ?
La loi Labbé (Loi n° 2014-110 du 6 février 2014) a été adoptée par l'Assemblée nationale le 22 juillet 2015. Elle vise à encadrer la commercialisation et utilisation de produits sanitaires dans les zones non agricoles, également appelés JEVI (Jardins, espaces végétalisés et Infrastructures). Ces zones correspondent aux espaces fréquentés par le public et aux jardins de particuliers.
L'objectif de cette loi est de protéger la population contre la toxicité de ces produits mais aussi de limiter la pollution des eaux.
L'application de cette loi comprend deux grandes étapes :
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- 1er janvier 2017 : l'utilisation des produits phytosanitaires sont interdits par l'état, les établissements publics et les collectivités locales. Quelques exceptions existent : les cimetières classiques et les terrains sportifs. La vente des produits phytosanitaires aux particuliers est interdite en libre-service.
- 1er janvier 2019 : l'interdiction d'utiliser des produits phytosanitaires est élargie aux particuliers. La vente aux particuliers ainsi que la détention de ces produits par ces mêmes usagers est également interdite.
2) Quelles sont les conséquences, dans nos jardins et jardineries
C'est très simple :
- en jardinerie (physique ou en ligne), vous ne pourrez plus acheter de pesticide ni d'herbicide de synthèse. Ils sont tout simplement retirés de la vente.
- chez vous, au jardin, vous n'avez plus le droit de les utiliser ni même d'en détenir.
En pratique, si vous faites partie de ces nombreux jardiniers qui mettent un point d'honneur à n'utiliser aucun de ces produits chimiques, cette nouvelle étape de la loi ne changera rien ni a vos habitudes, ni à votre jardin. Néanmoins, si vos voisins sont moins respectueux de la nature, sachez qu'ils ne pourront plus ni traiter ni désherber chimiquement… ce qui est plutôt une bonne nouvelle, surtout si vous avez un potager !
3) Tous les produits phytosanitaires sont-ils concernés ?
Pour être précis, il faut rappeler que le terme produit phytosanitaire est synonyme de phytopharmaceutique. Un produit phytosanitaire peut être issu d'une synthèse chimique, mais cela peut être aussi des produits d'origine naturelle (purin…) ou des encore des bactéries, des virus (comme le bacillus thuringiensis). Tous les produits phytosanitaires ne sont donc pas concernés.
Sont donc toujours autorisées et/ ou vendus :
- Les substances de base autorisées dans les JEVI (Jardins, Espaces végétalisés et Infrastructures) : la prêle, l'écorce de saule, la bière, l'huile de tournesol, le petit-lait, le vinaigre…
- Les produits de biocontrôle comme les phéromones, le baccillus thuringiensis,
- Les substances à faibles risques et préparations naturelles peu préoccupantes PNPP comme l'ortie (liste disponible ici),
- Les produits tout prêts autorisés en agriculture biologique et ceux qui portent la mention EAJ (Emploi Autorisé dans les Jardins).
Pour ceux qui seraient tentés de fabriquer leurs propres produits, en suivant, par exemple, une "recette" alléchante trouvée sur internet, sachez que ce n'est pas forcément une bonne idée. En effet, des produits naturels comme le sel, le vinaigre peuvent avoir une incidence défavorable sur le milieu, surtout s'ils sont utilisés en grande quantité !
4) La fin des pesticides, c'est partout en France et pour tout le monde ?
Malheureusement non ! Si la loi s'étend bien sûr tout le territoire, l'achat et l'utilisation de pesticides sont encore autorisés pour les entreprises du paysage. Elles doivent obligatoirement être détentrices du certificat professionnel Certiphyto. Ces entreprises peuvent utiliser des produits phytopharmaceutiques dans les jardins et espaces verts privés, comme ceux des entreprises et des copropriétés.
D'autres zones ne sont pas pour l'instant affectées : il s'agit des cimetières non considérés comme des espaces verts ou des promenades, les terrains de sport. Il est également possible d'obtenir des dérogations (pour des raisons de sécurité ou d'exploitation) pour les voies difficiles d'accès comme celles des bretelles et autres échangeurs autoroutiers.
5) Que faire si je retrouve des produits désormais interdits ?
Nos placards, garages et les abris de jardin recèlent parfois des surprises. L'interdiction de détenir des produits phytosanitaires de synthèse est une bonne occasion de faire du rangement et de vous en débarrasser. Attention, il s'agit de produits chimiques, dangereux. Ils ne doivent ni être utilisés (pour ne pas gâcher !) ni déversés dans les WC ni jetés à la poubelle. Comme tous produits chimiques, ils font l'objet d'une collecte spécifique et doivent être déposés en déchetterie.
Pour en savoir plus, n'hésitez pas à consulter le site de EcoDDS
6) Mon voisin continue à stocker de tels produits et/ou à les utiliser, que risque-t-il ?Que lui conseiller pour changer ses habitudes ?
La loi est claire sur le sujet, il s'agit d'une infraction pénale et il risque jusqu'à 6 mois d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende.
Vous lui rendrez service en l'en informant (aimablement, cela va sans dire), mais surtout, en lui conseillant des alternatives.
Voici quelques articles et fiches conseils qui pourront l'aider :
Jean-Claude SIMON, le 16 Janvier 2019
Cette interdiction franco-française faite aux seuls particuliers est discriminante et, partant, illégale en vertu du principe d’égalité devant la loi. En effet, en France, les agriculteurs notamment peuvent continuer à acheter et à utiliser cet herbicide systémique. Par ailleurs, tous les particuliers de l’UE ont la même possibilité.
Cette interdiction devrait reposer sur les conclusions objectives d’une étude scientifique rigoureuse sur l’éventuelle dangerosité du glyphosate qui, n’en déplaise à certains, n’a toujours pas été scientifiquement établie, laquelle étude doit être confiée à des experts reconnus et indépendants des fabricants, distributeurs, utilisateurs, politiques, associatifs et, évidemment, de l’Etat. Cela fait plus de 40 ans que cet herbicide systémique est employé sans qu’un seul cas de cancer n’ait pu lui être imputé scientifiquement. A l’heure actuelle, aucun jugement définitif, c’est à dire ayant autorité de la chose jugée ne le dit. On est à des années lumières du scandale de l’amiante auquel d’aucuns, avec des arrières pensées politiques, veulent l’assimiler … Après une telle étude, il sera alors temps de prendre objectivement les bonnes mesures pouvant aller effectivement jusqu’à l’interdiction immédiate si ce produit était effectivement cancérogène.