
Charançon de l'agave : Identification, traitement et prévention efficaces
Tout savoir sur ce ravageur
Sommaire
Ces dernières décennies, la multiplication des échanges internationaux, entre autres de plantes exotiques, a favorisé l’entrée sur le territoire d’insectes ravageurs. Si les conditions climatiques leur conviennent, ces insectes redoutés comme la pyrale du buis, la mineuse du marronnier ou le charançon rouge du palmier s’installent vite et se développent tout aussi vite. Depuis 2007, un coléoptère très prolifique a élu domicile sur le pourtour méditerranéen, de l’Hérault jusqu’aux Pyrénées orientales et la Corse : le charançon noir de l’agave. Comme son nom le laisse supposer, ce charançon jette son dévolu sur les agaves, mais aussi d’autres plantes de la famille des Agavacées, des Broméliacées…
Découvrez comment identifier le charançon noir de l’agave, mais aussi le traiter et prévenir son invasion.
Comment reconnaître le charançon noir de l'agave ?
Originaire d’Amérique centrale, et en particulier du Mexique, le charançon noir de l’agave (Scyphophorus acupunctatus) est un coléoptère nuisible de la famille des Curculionidées, cousin proche du charançon rouge (Rhynchophorus ferrugineus) qui a une prédilection pour les palmiers. Arrivé par hasard, via les échanges de commerce international, aux Pays-Bas puis en Italie, il a tranquillement franchi la frontière pour s’établir sur le pourtour méditerranéen, certainement séduit par la douceur de vivre.
C’est en 2007 qu’il a été repéré la première fois du côté d’Hyères. Depuis, il a fait son bonhomme de chemin jusqu’aux Pyrénées-Orientales et en Corse où les dégâts deviennent conséquents. Alors comment identifier cette nouvelle bestiole qui a su trouver, dans le sud de la France, les conditions climatiques chaudes et sèches qui lui rappellent son pays d’origine ?
Le charançon de l’agave est un coléoptère long de 10 à 19 mm maximum, entièrement noir (même les yeux !). Une couleur caractéristique qui permet de le distinguer assez facilement. Et si on y regarde de plus près, on peut remarquer un rostre incurvé (pour rappel le rostre est une sorte de trompe qui porte les pièces buccales à son extrémité) et des élytres striés. Ses ailes soudées ne lui permettent pas de voler, les charançons noirs se déplacent donc en marchant.

Le charançon noir de l’agave ©Nanosanchez (Wikimedia Commons)
Quant aux larves, elles sont de couleur blanc crème, avec une tête légèrement teintée d’orange.
Quel est le cycle de vie de ce coléoptère ?
Assez logiquement, tout commence par un accouplement entre un mâle et une femelle. Sachant que cet accouplement n’a pas lieu à une période précise, puisque les adultes sont actifs toute l’année, à partir du moment où le climat est chaud et sec. Dans leur pays d’origine, 4 à 5 générations de charançon de l’agave peuvent se succéder au cours d’une seule année, sachant que les larves ont un cycle de développement de 60 à 90 jours. Sous nos latitudes, la génération est supérieure, autour de 120 à 150 jours, voire plus.
Après l’accouplement, les femelles utilisent leur rostre pour percer les feuilles et parfois la tige, afin de se nourrir et surtout de pondre les œufs. Ensuite, les larves se développent tranquillement et se nourrissent (goulûment) à l’intérieur des feuilles, en se dirigeant vers la partie interne des feuilles et l’apex végétatif de la plante. Elles creusent des galeries et passent par quatre stades de développement. Matures, les larves qui mesurent 25 mm environ sont dix fois plus longues qu’à leur naissance.
Une fois qu’elle est arrivée à maturité, la larve cesse de se nourrir et construit son cocon avec des fibres de la plante hôte. La nymphose a lieu dans cette chambre nymphale, et une nouvelle génération d’adultes émergent. Grâce à leur rostre, les adultes percent les feuilles à travers la cuticule pour aller chercher la sève ou les exsudats des plantes. Bien gavés, ils peuvent à nouveau s’accoupler. Et le cycle recommence…
À quels végétaux s'attaque le charançon noir de l'agave ?
Comme son nom le laisse aisément deviner, le charançon noir de l’agave a un faible pour les agaves, et en particulier les sujets dotés d’une végétation relativement charnue. Les plantules intéressent moins ces coléoptères. Mais il peut s’attaquer à d’autres plantes proches :
- Les agaves et particulièrement ceux au développement conséquent comme l’agave d’Amérique (Agave americana), ou l’Agave tequilana. Mais potentiellement, tous les agaves peuvent être impactés
- Les Berchorneria ou lys du Mexique, des vivaces herbacées exotiques aux allures de yucca qui peuvent atteindre 3 m pour les plus hautes
- Les Furcraea, des plantes succulentes proches des yuccas. Furcraea bedinghausii est tout particulièrement sensible
- Les Yuccas, et en priorité le Yucca aloifolia, le Yucca recurvifolia, le Yucca filifera, le Yucca linearifolia, et le Yucca elephantipes
- Les cordylines peuvent être touchées, mais beaucoup plus rarement
- La noline, et en particulier Nolina longifolia
- Le Dasylirion longissimum
- Le Beaucarnea recurvata ou pied d’éléphant
- Les Puya
- Les Dyckia.
Les agaves sont les cibles principales du charançon noir, mais il peut s’attaquer à d’autres espèces d’Agavacées, de Dracenacées et de Broméliacées
Le charançon noir de l’agave peut aussi investir des vivaces tubéreuses comme les Polianthes tuberosa, originaires du Mexique et membres de la famille des Agavacées.
Quels sont les dégâts occasionnés par Scyphopholus acupunctatus ?
Lorsque les premiers signes d’infestation apparaissent, il est souvent trop tard, la plante étant déjà considérablement affaiblie. Si les adultes peuvent être repérés, les larves du charançon noir de l’agave agissent insidieusement, à l’intérieur des tissus de la plante hôte.
Concrètement, une plante dont les feuilles brunissent à la base envoie de mauvais signes. Petit à petit, des nécroses circulaires apparaissent et la base du feuillage pourrit. La plante s’incline, dépérit irrémédiablement, et finit par s’effondrer lamentablement à cause des galeries qui parcourent les tissus des plantes. Certains témoins expliquent avoir vu leur agave ou leur yucca s’écrouler subitement sous leurs yeux.

Agave attaqué par les adultes et les larves du charançon noir (Scyphophorus acupunctatus)
Les blessures infligées au feuillage par les piqûres des rostres sont aussi des portes d’entrée aux maladies fongiques ou aux bactérioses qui accentuent le pourrissement du cœur. Parmi les maladies bactériennes les plus communes, on peut citer la maladie dite de la pourriture molle provoquée par les bactéries du type Erwinia. Les larves vont s’alimenter des tissus de la plante attaquée en décomposition.
Comment lutter contre charançon noir?
Éradiquer des insectes ravageurs, non autochtones, dont les larves naissent et se développent à l’intérieur d’une plante est difficile, voire impossible, même avec des insecticides de synthèse. D’autant que ces insectes nuisibles n’ont pas de prédateurs naturels. C’est pourquoi la lutte directe est très compliquée. Une plante hôte qui montre des signes avérés d’attaque est difficile à sauver. Mais en agissant vite, c’est encore possible. Il suffit de supprimer en les coupant à la base les parties atteintes, puis de les broyer et de les emmener à la déchèterie, en signalant l’attaque. Il ne faut surtout pas jeter des fragments de plante atteinte dans le bac à compost.
Une plante trop atteinte doit être arrachée et emmenée à la déchèterie.
Quoi qu’il en soit, en cas de suspicion ou d’observation suspecte de charançons noirs de l’agave, il est recommandé de faire un signalement auprès de l’organisme FREDON de votre région qui cartographie leur évolution et leur avancée.
Des essais de lutte biologique à base de nématodes ont été menés et paraissent concluants. Il s’agit essentiellement des nématodes parasitoïdes du type Steinernema carpocapsea, utilisés pour la lutte contre le charançon rouge des palmiers. Ces nématodes s’appliquent par pulvérisation sur le feuillage de manière préventive ou curative.
Pour renforcer la protection, il est essentiel de prévenir l’infestation le plus précocement possible. Pour cela, plusieurs moyens peuvent être mis en œuvre :
- Une surveillance régulière du feuillage des plantes cibles qui peut permettre de repérer des adultes et d’agir en les capturant pour les éliminer
- La pose de pièges à phéromones qui permettent de détecter la présence d’adultes et de les capturer afin de limiter les accouplements. Là encore, les systèmes de piégeages du charançon rouge du palmier semblent montrer leur efficacité. Pour autant, ils ne sont pas efficaces à 100 % et doivent être complétés par des applications de nématodes.
Sinon, si vous habitez une zone où la présence du charançon noir de l’agave est avérée et souhaitez planter des sujets de la famille des Agavacées, des Dracenacées ou des Broméliacées, privilégiez les petits sujets, non exportés, et essayez de diversifier les espèces en introduisant d’autres succulentes comme les cactées ou les aloès.
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