Pucerons, cochenilles : le savon noir est-il vraiment efficace ?

Le savon noir : un allié naturel contre certains parasites

Le savon noir est un produit naturel fabriqué à partir d’huiles végétales (huile d’olive ou de lin) et de potasse. Il est entièrement biodégradable et sans danger pour l’environnement, les humains, les animaux et les plantes lorsqu’il est utilisé correctement.

Le savon noir agit comme un insecticide de contact en obstruant les pores respiratoires et en dissolvant la couche graisseuse (cuticule) qui protège les insectes à cuticule molle. Cette action entraîne l’asphyxie, la déshydratation et la mort des parasites. De plus, il dissout les sécrétions cireuses des cochenilles et nettoie le miellat laissé par les pucerons, réduisant ainsi les risques de fumagine (ce fameux champignon noir).

Le savon noir agit uniquement sur les insectes avec lesquels il entre en contact. Il n’a pas d’effet systémique, c’est-à-dire qu’il ne pénètre pas dans la plante pour tuer les autres insectes qui se nourrissent de sa sève.

Les avantages du savon noir

• Naturel et écologique : Contrairement aux insecticides chimiques, souvent nocifs pour l’environnement et la biodiversité, le savon noir est une alternative douce et respectueuse.
• Facile à utiliser : Une fois dilué, il s’applique simplement à l’aide d’un pulvérisateur ou d’un chiffon.
• Compatible avec les cultures comestibles : Il peut être utilisé sur les légumes, fruits et herbes aromatiques sans risque pour la consommation, à condition de bien rincer les récoltes avant utilisation.

Les limites du savon noir

• Efficacité limitée : Le savon noir agit uniquement par contact direct avec les parasites. Si vous oubliez certaines zones infestées, les insectes survivants pourront rapidement se multiplier.
• Risque de phytotoxicité : Mal utilisé (dosage trop élevé, application en plein soleil), le savon noir peut brûler les feuilles et affaiblir les plantes. Il faut donc respecter les doses recommandées (que nous verrons au chapitre 3).
• Effet non sélectif : Bien qu’il soit naturel, le savon noir doit être limité aux zones infestées, afin d’épargner les insectes utiles comme les coccinelles, les abeilles ou les chrysopes. Privilégiez aussi les heures où les auxiliaires sont moins actifs (tôt le matin ou en fin de journée).
• Sensibilité à la pluie : Une fois appliqué, le savon noir peut être rapidement éliminé par la pluie ou l’arrosage. Il est donc préférable de l’utiliser par temps sec pour maximiser son efficacité.

Quels parasites peut-on traiter avec le savon noir ?

Parasites sensibles au savon noir

• Les pucerons : verts, noirs, jaunes ou laineux, ces insectes sucent la sève des jeunes pousses, affaiblissant les plantes et favorisant l’apparition de fumagine.
• Les cochenilles farineuses : recouvertes d’une substance cireuse blanche, elles sont vulnérables à l’action du savon noir, qui dissout leur protection et les élimine.
• Les jeunes larves des cochenilles à bouclier : les larves encore dépourvues de bouclier sont sensibles au savon noir, contrairement aux adultes protégés par leur carapace rigide.
• Les aleurodes (mouches blanches) : petits insectes volants qui pondent sous les feuilles et provoquent des dégâts sur les plantes potagères et ornementales. Le savon noir agit sur les larves et les adultes par contact.
• Les thrips : insectes minuscules et discrets, ils causent des taches, décolorations et déformations sur les feuilles et les fleurs.
• Les araignées rouges et les acariens : ces minuscules ravageurs, actifs par temps chaud et sec, affaiblissent les plantes en aspirant leur sève.
• Les psylles : ces petits insectes sauteurs, semblables à des pucerons, provoquent des déformations et le jaunissement des feuilles.
• Certaines jeunes chenilles et larves à corps mou : le savon noir peut affecter les jeunes chenilles et autres larves tendres en bloquant leur respiration.

Parasites peu sensibles ou résistants

• Les cochenilles à bouclier adultes : protégées par une coque rigide, elles sont peu affectées par le savon noir. Leur traitement nécessite, en plus du savon noir, une action mécanique (brossage ou nettoyage manuel) que l’on verra plus bas dans l’article.
• Les coléoptères et autres insectes à carapace dure : leur corps est imperméable à la solution de savon noir.
• Les œufs de parasites : souvent recouverts de couches protectrices, ils échappent à l’action du savon noir.

L’efficacité du savon noir est donc dépendante du type d’insectes, mais aussi de son stade de développement. Le savon noir nécessite de ce fait une application ciblée.

Pucerons, cochenilles farineuses et cochenilles à bouclier

Prudence pour les insectes auxiliaires

Bien que le savon noir soit un produit naturel, son action par contact peut affecter non seulement les parasites, mais aussi certains insectes utiles, comme les coccinelles, les chrysopes ou les larves de syrphes. Ces auxiliaires sont pourtant précieux pour maintenir l’équilibre du jardin, d’autant plus qu’ils mangent les pucerons et les cochenilles !

Pour limiter les impacts négatifs sur ces alliés du jardin, il est essentiel d’adopter des pratiques ciblées et réfléchies. Nous vous invitons à consulter le chapitre “Comment protéger les insectes auxiliaires du jardin ?” qui se trouve plus bas dans cet article.

Comment appliquer le savon noir ?

Choisir le bon savon noir

Pour le jardin, le savon noir liquide est généralement préféré, car il est facile à doser et à mélanger dans un pulvérisateur. Choisissez un savon noir fabriqué à partir d’huiles végétales naturelles (huile d’olive ou huile de lin), sans additifs chimiques, ni parfums artificiels et idéalement certifié biologique pour respecter vos plantes, les auxiliaires du jardin et l’environnement. Vérifiez les étiquettes pour éviter les produits contenant des conservateurs ou des détergents agressifs.

Préparation de la solution

Pour préparer une solution de savon noir, vous aurez besoin de :

• 5 cuillères à soupe de savon noir liquide (environ 50 ml) ;
• 1 litre d’eau tiède ;
• (Facultatif) Quelques gouttes d’huile de neem (un insecticide naturel, extrait des graines du margousier) pour renforcer l’effet répulsif.

Versez la solution dans un pulvérisateur propre et mélangez bien le tout jusqu’à ce que le savon soit entièrement dissous.

Application

Pulvérisez la solution directement sur les parasites, en insistant sur les zones infestées : sous les feuilles, sur les tiges et autour des bourgeons. Veillez à effectuer cette opération tôt le matin ou en fin de journée, lorsque le soleil est moins intense, pour éviter que les feuilles ne brûlent et pour prolonger l’efficacité du produit.

Renouvelez l’application tous les 3 à 7 jours jusqu’à disparition des parasites.

Précautions

Bien que le savon noir soit naturel, il peut parfois causer des brûlures sur les feuilles sensibles ou jeunes. Il est donc conseillé de tester la solution sur une petite portion de la plante avant de traiter l’ensemble.

Et en intérieur ?

Pour les plantes d’intérieur, la méthode est exactement la même. Cependant, une fois les parasites éliminés, essuyez délicatement les feuilles avec un chiffon humide pour retirer tout résidu de savon, qui pourrait attirer la poussière ou gêner la respiration de la plante sur le long terme.

Quelles solutions contre les cochenilles à bouclier ?

Comme nous l’avions évoqué plus haut, le savon noir est efficace sur les jeunes cochenilles à bouclier. Mais les adultes, plus résistants, demandent une approche légèrement différente :

1. Localisez les cochenilles sous les feuilles, sur les tiges ou à la base des branches.
2. Retirez-les avec un chiffon humide, une brosse douce ou un coton-tige imbibé d’alcool à 70°.
3. Appliquez une solution de savon noir : Dans un pulvérisateur, mélangez 5 cuillères à soupe de savon noir dans 1 L d’eau tiède. Ajoutez quelques gouttes d’huile de neem (un insecticide naturel) pour renforcer l’effet. Pulvérisez sur les zones infestées.
4. Renouvelez le nettoyage et l’application de savon noir tous les 5 à 7 jours jusqu’à élimination complète.

Cochenilles à bouclier

Les alternatives et solutions complémentaires

Si le savon noir seul ne suffit pas, voici quelques méthodes supplémentaires pour lutter contre les pucerons et cochenilles :

Introduisez des insectes auxiliaires

Les coccinelles et les larves de chrysopes sont des prédateurs naturels des pucerons. Elles peuvent être achetées en jardinerie (vous les trouverez ici sur notre site) et relâchées dans votre jardin. Encouragez leur présence en plantant des fleurs mellifères (Phacélie, Bourrache, etc) et en installant des abris (comme des hôtels à insectes) pour leur offrir un refuge.

Larves de coccinelle et Larves de chrysope

Utilisez de l’huile de neem

Cette huile végétale agit comme un insecticide naturel en perturbant le cycle de vie des parasites, notamment leurs œufs et larves. On peut, soit simplement ajouter quelques gouttes à la préparation de savon noir, soit utiliser cette technique :

• Mélangez 5 ml d’huile de neem avec 1 L d’eau tiède.
• Ajoutez 1 à 2 gouttes de savon noir pour faciliter l’émulsion.
• Pulvérisez la solution sur les feuilles (dessus et dessous), les tiges et les zones infestées.
• Effectuez le traitement tôt le matin ou en soirée, à l’abri du soleil.
• Répétez tous les 7 à 10 jours jusqu’à disparition des parasites.

Pulvérisez des décoctions de plantes répulsives

L’ail, l’ortie ou la tanaisie peuvent être infusés pour produire des solutions efficaces contre les insectes nuisibles. Pour en savoir plus, lisez nos articles : “Les plantes répulsives à utiliser en purin et décoction pour protéger les cultures” et “Les insecticides naturels à utiliser en purin et décoction“.

Taillez les parties infestées :

En cas d’attaque sévère, coupez et éliminez les branches les plus touchées pour limiter la propagation des parasites.

Attirez les insectes indésirables

Vous pouvez également détourner les pucerons, en les attirants sur d’autres plantes plus attrayantes pour eux : Camomille, Capucine, Œillet d’Inde, Cosmos, etc.

Comment protéger les insectes auxiliaires du jardin ?

Pour profiter des bienfaits du savon noir tout en préservant les insectes utiles, quelques précautions s’imposent :

1. Appliquer le savon noir uniquement sur les zones infestées : Ciblez précisément les ravageurs visibles et évitez de pulvériser sur toute la plante ou sur les parties non infestées.
2. Traiter aux heures où les auxiliaires sont peu actifs : Pulvérisez tôt le matin ou tard le soir, lorsque les abeilles et autres insectes bénéfiques ne sont pas en activité.
3. Éviter les plantes en fleurs : Ne pulvérisez pas le savon noir sur des plantes en pleine floraison pour ne pas perturber les pollinisateurs. Certes, les pucerons et cochenilles affaiblissent la plante, mais sont rarement mortelles et vous pouvez vous permettre d’attendre quelques semaines la fin de la floraison.
4. Rincer après traitement : Une fois les parasites éliminés, rincez les feuilles (à moins qu’une pluie s’en charge) pour retirer les résidus de savon et permettre aux auxiliaires de revenir sans danger.
5. Favoriser la biodiversité : Plantez des fleurs mellifères (phacélie, bourrache, etc) et installez des hôtels à insectes.

un hotel à insectes

Verdict : le savon noir, un allié efficace mais pas infaillible

En conclusion, le savon noir s’impose comme une solution naturelle et efficace pour lutter contre les pucerons et certaines cochenilles, à condition d’être utilisé correctement. Bien qu’il ne soit pas infaillible face aux parasites les plus résistants, son action ciblée permet de réduire significativement les infestations sans avoir recours à des produits chimiques.

Cependant, son utilisation doit être réfléchie : appliquer le savon noir de manière excessive ou indiscriminée peut nuire aux insectes utiles et à l’équilibre du jardin. Avec une application régulière et mesurée, il reste un outil précieux pour protéger vos plantes tout en respectant l’environnement.

L’avis personnel d’Ingrid :

L’efficacité du savon noir n’est plus à démontrer. Cependant, je considère qu’il doit être utilisé qu’en cas de nécessité et de manière temporaire, le temps d’installer des plantes mellifères au jardin afin d’attirer les insectes auxiliaires (coccinelles et compagnie). Ces insectes utiles joueront, au fil du temps (il faut parfois quelques années), le rôle de régulateur naturel, et vous n’aurez alors plus à lever le petit doigt contre les pucerons.