Permaculture et potager bio : choisir un paillage écologique

Comprendre le paillage écologique

Le paillage est une technique de jardinage consistant à recouvrir le sol autour des plantes avec des matériaux organiques (ou plus rarement, minéraux). Cette méthode vise à protéger, nourrir et améliorer la structure du sol, tout en réduisant les besoins en eau et en limitant la croissance des adventices. Dans un contexte de permaculture, le paillage dépasse la simple fonction de couverture ; il s’inscrit dans une démarche de création d’un écosystème autonome et durable.

En effet, en permaculture, le paillage est utilisé non seulement pour ses bénéfices immédiats sur les cultures et le sol, mais aussi pour son rôle dans la simulation des processus naturels. Il aide à recréer un cycle fermé où les déchets organiques sont recyclés pour nourrir le sol, simulant ainsi la manière dont les forêts se régénèrent naturellement. Cela aide à maintenir un sol vivant, riche en microorganismes bénéfiques et en nutriments essentiels, tout en conservant l’humidité et en régulant la température du sol.

On favorise les paillis issus du jardin !

Utiliser des paillis issus directement du jardin, ou tout au moins très locaux, comporte plusieurs avantages clés, surtout dans une approche de permaculture où l’objectif est de minimiser les intrants externes et de maximiser l’utilisation des ressources locales :

• Réduction des déchets : en transformant les “rebus du jardin” tels que les feuilles mortes, les tontes de gazon, les branches coupées, et même certains déchets de cuisine en paillis, on réduit la quantité de détritus envoyée à la poubelle tout en fournissant des nutriments essentiels au sol.
• Amélioration de la santé du sol : les matériaux organiques utilisés comme paillis se décomposent progressivement, ajoutant de la matière organique au sol. Cela améliore la structure du sol, sa capacité de rétention d’eau, sa perméabilité et sa fertilité.
• Cycle des nutriments : en utilisant les résidus du jardin comme paillis, on crée un cycle fermé de nutriments. Ceux-ci sont absorbés par les plantes, puis retournés au sol lorsque les résidus se décomposent, ce qui réduit le besoin d’ajouter des fertilisants chimiques.
• Adaptation locale : les matériaux produits sur place sont souvent mieux adaptés aux conditions locales. Ils sont acclimatés et donc plus efficaces pour répondre aux besoins spécifiques des plantes et des sols de la région.
• Économie : le paillage avec des matériaux du jardin est une solution économique puisqu’il évite l’achat de paillis commerciaux, généralement coûteux et parfois traités avec des produits chimiques.

Favoriser des paillis issus du jardin (ou du jardin du voisin) permet non seulement de contribuer à la durabilité de l’environnement, mais aussi de renforcer l’autonomie et la productivité au jardin. Cette pratique crée un écosystème jardin plus résilient et plus productif, tout en respectant les principes de durabilité et d’économie de ressources.

Quelques précautions d’usage lorsqu’on souhaite pailler

• Évitez d’étouffer les racines : appliquez le paillis en une couche raisonnable (5 à 10 cm selon le matériau). Une épaisseur excessive peut empêcher l’air de circuler, asphyxiant les racines et ralentissant la décomposition.
• Vérifiez l’absence de contaminants : assurez-vous que les matériaux utilisés, comme la paille, le foin ou le carton, soient exempts de pesticides, d’herbicides ou d’encres toxiques. Ces résidus peuvent nuire à la vie du sol et affecter vos cultures.
• Évitez les matériaux mal décomposés : les tontes de gazon fraîches ou d’autres matières organiques non séchées peuvent fermenter, dégager des odeurs désagréables, voire attirer des nuisibles. Si vous utilisez des matériaux frais, appliquez-les en couches fines ou laissez-les sécher avant.

Les différents paillis organiques

La paille

La paille est légère et se compose principalement de tiges sèches de céréales (blé, avoine, orge). La paille est idéale pour les légumes du potager, notamment les tomates, courgettes et fraises. Appliquez une couche de 5 à 10 cm pour une efficacité optimale. Évitez d’utiliser de la paille contaminée par des pesticides ou des herbicides.

Avantages :

• Limite efficacement les adventices en bloquant la lumière.
• Garde le sol frais et humide.
• Se décompose lentement, enrichissant progressivement le sol en matière organique.

Le foin

Proche de la paille, le foin est constitué de graminées et de plantes fauchées. Le foin est pratique pour les cultures gourmandes (cucurbitacées) ou pour les parcelles nécessitant un sol riche. Vérifiez l’origine pour éviter les contaminants chimiques. Cependant, il peut contenir des graines de plantes indésirables si le foin n’a pas été coupé avant la montée en graines.

Avantages :

• Offre une excellente couverture et se décompose rapidement, enrichissant rapidement le sol.
• Attire les organismes bénéfiques comme les vers de terre.

Les copeaux de bois et le BRF (Bois Raméal Fragmenté)

Le BRF est constitué de jeunes branches broyées (moins de 7 cm de diamètre), riches en nutriments. Étalez une couche de 5 cm autour des plantes pérennes, en prenant soin de ne pas trop coller au tronc pour éviter l’humidité excessive. Veillez à attendre quelques mois avant d’utiliser du BRF fraîchement broyé pour ne pas épuiser l’azote du sol (cfr. faim d’azote). Évitez les copeaux de résineux pour des cultures sensibles.

Avantages :

• Favorise la biodiversité en stimulant les champignons bénéfiques dans le sol.
• Structure le sol en profondeur.
• Idéal pour des cultures pérennes comme les arbustes, les arbres fruitiers ou les haies.

Les tontes de gazon

Résidu des tontes de pelouse, le gazon est riche en azote. Vous pouvez appliquer vos tontes de pelouse en couches fines (1 à 2 cm), renouvelées régulièrement. Si vous avez une grande quantité, laissez sécher avant application. Attention, le gazon peut fermenter et dégager des odeurs désagréables ou favoriser le développement de moisissures.

Avantages :

• Idéal pour stimuler la vie microbienne et nourrir le sol rapidement.
• Se décompose rapidement, rendant ses nutriments disponibles pour les plantes.

Les feuilles mortes

Abondantes en automne, elles constituent un paillis gratuit et riche en carbone. Étalez une couche épaisse, 5 cm, de feuilles hachées (pour accélérer la décomposition) sur les cultures ou les zones de repos du potager. Évitez les feuilles épaisses (comme celles du platane) qui se décomposent difficilement et celles qui peuvent contenir des composés toxiques (la juglone du noyer par exemple).

Avantages :

• Améliorent la structure du sol en favorisant la formation d’humus.
• Protègent le sol en hiver contre l’érosion et le froid.
• Attirent les organismes du sol, notamment les vers de terre.

Les écorces et aiguilles de pin

Ces paillis sont riches en tanins et légèrement acidifiants au niveau de la couche superficielle du sol. Étalez une couche de 3 à 5 cm autour des plantes adaptées. Limitez leur utilisation pour les légumes du potager traditionnel, sauf si le sol est naturellement acide.

Avantages :

• Parfaites pour les plantes aimant les sols acides (fraisiers, rhododendrons, myrtilles).
• Résistantes, ils se décomposent lentement et conviennent aux paillages longue durée.

Le miscanthus

Le miscanthus est une plante vivace aussi appelée “herbe à éléphant”. Ses tiges séchées sont transformées en copeaux ou en fibres, parfaits pour un paillage naturel. Grâce à sa lente dégradation, le miscanthus demande peu de renouvellement, ce qui le rend économique sur le long terme.

Avantages :

• Se décompose lentement, offrant une couverture efficace sur le long terme.
• Cultivé localement, sans engrais ni produits chimiques, il a un faible impact environnemental.
• Léger, facile à manipuler et à répartir au sol.

Autres paillis organiques

À tout cela, on pourrait encore citer le paillis de chanvre, les paillettes de lin ou les cosses de sarrasin. Les cosses de cacao sont adaptées pour les sols pauvres, car ce paillis est très riche en azote et en potasse.

Les feuilles d’ortie ou de consoude sont riches en éléments nutritifs comme l’azote. Il y a donc un intérêt certain à en tapisser le sol de son potager, en particulier au pied des légumes gourmands. Privilégiez plutôt les jeunes feuilles.

Les paillis recyclés

Le carton brun, dépourvu d’encre et de ruban adhésif, constitue une excellente barrière contre les adventices. Placé directement sur le sol, il se dégrade lentement, apportant de la matière organique au sol. Il est particulièrement utile pour les zones à désherber ou en préparation pour de nouvelles cultures.

→ Pour en savoir plus sur l’utilisation de carton au jardin, lisez l’article d’Olivier.

Le papier journal (européen, c’est-à-dire garanti avec encre alimentaire), quant à lui, est un autre choix accessible. Appliqué en fine couche, il agit comme un paillage temporaire, empêchant les herbes indésirables de se développer. Toutefois, pour éviter qu’il ne s’envole ou ne sèche trop vite, il est conseillé de le recouvrir d’un autre paillis, comme de la paille ou des tontes de gazon.

→ Pour en savoir plus sur l’utilisation de papiers journaux au jardin, lisez la fiche conseil d’Ingrid.

Un paillis vivant

On sort du concept de paillage au sens propre, mais les engrais verts peuvent aussi constituer un paillage intéressant pour l’hiver. En effet, l’hiver est une période où le sol du potager est souvent nu, ce qui favorise le développement des mauvaises herbes, l’érosion et l’apparition d’une croûte de battance.

Pour limiter les efforts, choisissez des engrais verts gélifs comme la moutarde ou la phacélie qui vont former une couche fertile. Cet engrais vert sera enfoui dans le sol à la fin de l’hiver. En photo ci-dessous, la vesce.

Comment choisir son paillage ?

Le choix d’un paillage dépend de plusieurs critères spécifiques liés à votre jardin et à vos objectifs. Voici les principaux éléments à prendre en compte :

1. Le type de culture
   • Légumes gourmands (tomates, courgettes, cucurbitacées) : privilégiez des paillis riches en nutriments comme le foin ou les tontes de gazon.
   • Plantes pérennes (arbustes et arbres fruitiers) : optez pour des paillis durables comme le BRF ou les copeaux de bois.
   • Cultures sensibles aux sols acides (fraisiers, myrtilles) : les écorces ou aiguilles de pin sont idéales.
2. Les besoins en nutriments du sol
   • Sol pauvre ou cultures exigeantes : choisissez des paillis azotés comme les tontes de gazon ou les cosses de cacao.
   • Sol déjà riche en matière organique : favorisez des paillis carbonés (paille, feuilles mortes) pour équilibrer le sol.
3. Les conditions climatiques locales
   • Climat sec ou étés chauds : des paillis épais et légers comme la paille ou le miscanthus limitent l’évaporation et gardent le sol frais.
   • Zones humides ou hiver rigoureux : utilisez des paillis qui protègent contre l’excès d’eau ou le froid, comme les feuilles mortes ou le foin.
4. Les objectifs du jardinier
   • Réduction des adventices : le carton brun ou la paille sont très efficaces pour bloquer la lumière.
   • Amélioration de la structure du sol : le BRF ou les feuilles mortes apportent une grande quantité de matière organique.
   • Protection hivernale : les engrais verts gélifs (phacélie, moutarde) ou les feuilles mortes évitent que le sol ne reste nu en hiver.

Tableau comparatif des différentes solutions de paillage au potager