Permaculture et petit jardin, est-ce possible ?

Petit rappel sur la permaculture

La permaculture est une approche de conception de systèmes agricoles et de jardinage qui s’inspire des écosystèmes naturels. Voici les principaux principes :

• Soin de la terre : La santé du sol est au cœur de la permaculture. Un sol vivant est un sol riche qui va nourrir les plantes et la biodiversité. En nourrissant (compost…) et en protégeant le sol (décompactage à la biofourche plutôt que de retourner la terre ; utilisation de paillage…), on favorise la croissance des plantes et on maintient l’équilibre de l’écosystème.
• Soin des personnes : La permaculture ne se limite pas aux plantes et aux sols. Elle vise également à créer des environnements de vie durables et agréables pour les gens, en promouvant des pratiques qui améliorent la qualité de vie et la résilience des communautés.
• Partage des ressources : Ce principe encourage le partage (récoltes, connaissances ou ressources) pour que tout le monde en bénéficie (humains, animaux, insectes…). La permaculture privilégie aussi une consommation responsable des ressources.

L'observation en permaculture dans un petit jardin

Avant de planter quoi que ce soit, il est essentiel de bien connaître son jardin : Notez les zones ensoleillées et ombragées de votre jardin tout au long de la journée. Cela vous aidera à positionner les plantes en fonction de leurs besoins en lumière. On dit qu’il faut observer son jardin durant une année, pour connaitre la course du soleil sur le jardin selon les saisons.

Identifiez les microclimats créés par des éléments comme les murs, les clôtures et les bâtiments. Ces zones peuvent offrir des conditions particulières, comme une protection contre le vent ou une chaleur supplémentaire, qui peuvent être exploitées pour certaines cultures.

Dans un petit jardin, puisque la surface au sol est petite, on va exploiter au maximum toutes les structures verticales que l’on pourrait utiliser pour faire pousser des plantes grimpantes. De ce fait, il vous faut les répertorier : une clôture, un mur mitoyen, la façade de la maison, le toit du garage ou d’un abri de jardin, etc. Assurez-vous que votre voisin donne son accord en cas de clôture ou mur mitoyen. Astuce : vous pouvez créer une structure ou un treillage en parallèle à ces murs et clôtures si elles appartiennent au voisin. De même, assurez-vous que les toitures ont une capacité de charge supplémentaire pour accueillir le poids des plantations.

Testez aussi la qualité et la texture de votre sol. Est-il sableux, argileux ou limoneux ? Acide, plutôt neutre ou calcaire ? Identifiez sa nature va vous permettre de choisir ensuite les plantes adaptées et les amendements à apporter. Pour vous y aider, lisez les articles : « Sol acide, sol neutre ou sol calcaire : comment savoir ? » et « Déterminer la texture de son sol : argileux, sableux, limoneux ».

Cette observation permet ensuite de passer à l’étape suivante : concevoir votre espace.

Le design dans un petit jardin en permaculture

Il faut maintenant faire un plan de votre jardin. Vous pouvez utiliser une simple feuille de papier (ou papier millimétré) ou un logiciel de design pour dessiner le plan de votre jardin à l’échelle.

1- Commencez par y indiquer les structures existantes : Placez les bâtiments, les clôtures, les allées et autres structures fixes. Profitez-en pour réfléchir si ces structures sont exploitables : peut-on faire courir des courges sur la toiture du garage ? Une vigne, peut-elle grimper le long de la façade ? Etc.

2- Placez, si vous le souhaitez, un coin de détente ou de loisir.

3- Dessinez les chemins principaux et secondaires pour assurer un accès facile à toutes les parties du jardin.

4- Représentez les structures que vous souhaitez construire pour exploiter la hauteur : pergola, treillage, mur de jardinière, etc. On peut, par exemple, entourer la zone de détente d’une clôture en ganivelle où l’on fera grimper des plantes grimpantes (haricots à rames, courges, vigne…). Dans ce petit jardin, exploiter les hauteurs va vous permettre d’optimiser l’espace et de cultiver davantage.

5- Dans l’idéal, placez les récupérateurs d’eau de pluie, au bas des descentes d’eau des habitations et des dépendances. Vous réduirez ainsi votre consommation d’eau potable.

6- Placez un ou plusieurs bacs à compost ou des vermicomposteurs à un endroit pratique, mais discret, de préférence à la mi-ombre, pour faciliter l’apport de déchets organiques et la collecte de compost. Si vous manquez de place, optez pour un bokashi (petit composteur japonais qui utilise des microorganismes). Si vraiment, vous n’avez pas de place, jetez vos déchets dans les composteurs communaux, mais vous vous priverez d’engrais naturel.

7- Choisissez et délimitez ensuite les différentes zones de culture, en fonction de ce que vous souhaitez et selon les limites de votre jardin :

• Un petit verger
• Un petit point d’eau
• Un potager
• Un coin de plantes aromatiques
• Un poulailler s’il y a assez de place
• Une serre ou des petits châssis
• Etc

Dans un petit jardin, vous pouvez adapter ces zones comme suit :

• Zone 1 : Zone de production intensive : Près de la maison, pour les herbes aromatiques, les légumes-feuilles et les plantes nécessitant des soins réguliers.
• Zone 2 : Zone de production modérée : Un peu plus éloignée, pour les légumes-racines, les petits fruits et les arbustes nécessitant moins d’entretien.
• Zone 3 : Zone de production extensive : À la périphérie, pour les arbres fruitiers, les vignes et les cultures pérennes.

8- Choisissez et représentez vos plantes que vous allez installer. Privilégiez les variétés adaptées à votre région ou locales et à votre nature de sol.

Prévoyez du temps pour dessiner votre jardin et planifier votre aménagement

Un petit verger ou des petits fruitiers

Dans les petits jardins, on oublie la fameuse « strate haute » en permaculture, qui se compose de grands arbres de différentes variétés. Si vous avez assez de place pour planter un arbre fruitier, c’est déjà très bien, sinon, reportez votre choix sur les arbustes fruitiers nains ou les arbustes « en palmette ». Ces derniers ont une forme en « U », voir en « double U » et pourront être planté le long d’un mur, d’une clôture ou en bordure d’une zone du jardin (y compris le long des chemins de passage).

Pensez aussi aux petits fruitiers, comme les framboisiers, myrtilliers, cassissiers… Là aussi, il existe des variétés naines ou moins hautes que d’autres, par exemple le framboisier nain remontant ‘Lucky Berry’ ou le cassissier ‘Little Black Sugar’, parfait quand on a peu d’espace.

Pour les plus petits jardins, on pourra planter des fraisiers, que l’on pourra même cultiver sur un mur de jardinières ou dans une tour à fraisiers.

Un framboisier et une tour de fraisiers

Un petit potager en permaculture

Si votre but est de récolter des légumes, délimitez un coin potager dans votre jardin. Idéalement, il vous faudra le diviser en 4 ou 5 zones afin de pratiquer la rotation des cultures. Cela permet de maintenir la fertilité du sol, de réduire les maladies et les parasites, et de maximiser les rendements des cultures de manière durable. Si vous manquez de places, vous pouvez cultiver en carré potager, en conteneur ou en bac.

De plus, en permaculture, on a pour principe de planter les légumes très serré ce qui permet de gagner de la place.

Il faut savoir également que les buttes de culture enrichissent certes le sol, mais prennent également plus de place au jardin. Ces buttes ont aussi besoin d’humidité pour décomposer le bois, ce que l’on ne trouve pas forcément dans les petits jardins urbains. Si votre terre est riche et que vous apportez régulièrement du compost ou des engrais verts, vous pouvez vous en passer, de même si vous pratiquez la culture en bac.

Là aussi, jouez sur les hauteurs ! Cultivez des haricots à rames, mais aussi des courges (potiron, courge spaghetti…), des concombres, des melons, des tomates, une vigne, etc. Plantez-les au pied de treillage, d’une pergola, de clôture ou tout autres supports.

Pensez aussi aux associations bénéfiques :

• Certaines plantes, comme les légumineuses, fixent l’azote, enrichissant le sol pour d’autres cultures.
• Les plantes peuvent se protéger mutuellement contre les ravageurs et les maladies, comme les œillets d’Inde repoussant les nématodes.

Et pour limiter l’arrosage, placez du paillage autour des pieds de vos plantes potagères. Vous limiterez l’évaporation de l’eau, tout en enrichissant le sol et en évitant la pousse d’herbes indésirables.

Pour en savoir plus, lisez également nos articles :

• Potager en permaculture : tout savoir sur les associations de légumes
• La permaculture au potager : notre guide saison par saison
• Potager en permaculture : par où commencer ?

Carré potager et structure pour haricots grimpants

Un petit point d'eau pour la biodiversité

Si vous avez assez de place, envisagez de créer un petit bassin pour favoriser la biodiversité et attirer ainsi des insectes bénéfiques : libellules, demoiselles et dytiques, par exemples, sont des chasseurs efficaces qui se nourrissent de moustiques, de mouches et d’autres petits insectes nuisibles. De plus, ce bassin permettra de créer une ambiance plus humide au jardin.

Si vous avez peu de place, vous pouvez installer un minibassin, comme décrit dans cet article : « Mini bassin : un petit jardin d’eau pour la terrasse ou le balcon ».

Et si cela n’est pas possible, placez simplement des petits bols d’eau ou une fontaine pour attirer les oiseaux et les insectes utiles, comme les abeilles ou les syrphes, qui ont besoin de se désaltérer. N’oubliez pas de renouveler l’eau fréquemment afin de la garder propre et limiter les larves de moustique.

Un petit bassin au jardin

Créer des habitats pour la faune

Encourager la biodiversité est un aspect important de la permaculture :

• Hôtels à insectes : Installez des hôtels à insectes pour attirer les pollinisateurs et les prédateurs naturels de nuisibles. Préférez les hôtels à insectes « monospécifiques », c’est-à-dire que chaque hôtel est conçu pour attirer et protéger une seule espèce. Par exemple, un hôtel avec des tiges de bois creux pour les abeilles solitaires, etc. Les petits tas de bois sont aussi de formidables lieux de vie pour la biodiversité.
• Plantes nectarifères : Plantez des fleurs riches en nectar pour attirer les pollinisateurs, comme les abeilles et les papillons.
• N’oubliez pas les points d’eau (bols ou fontaine) comme vu plus haut.

Hôtel à insecte pour abeille solitaire

Expérimentez !

Créer un jardin en permaculture dans un petit espace est non seulement possible, mais c’est aussi une démarche enrichissante et bénéfique à bien des égards. Certes, vous n’atteindrez pas l’autonomie alimentaire, peut-être pas non plus un jardin autonome (sans apport extérieur), mais vous contribuerez, à votre échelle, au maintien de la biodiversité, tout en récoltant des fruits et légumes sains. N’hésitez pas à vous lancer, à expérimenter et à adapter ces conseils à votre propre situation, en observant, expérimentant et apprenant au fil du temps. Soyez patient et votre petit jardin en permaculture deviendra ainsi un espace de vie agréable et un exemple de jardinage durable.

Le petit mot d’Ingrid : Je vous conseille de lire (ou d’emprunter) ce livre très inspirant : « Mon petit jardin en permaculture », publié chez Terre Vivante, qui relate le témoignage de Joseph Chauffrey et son petit jardin urbain.